L'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a publié un avis et un rapport détaillés concernant un enjeu crucial pour l'écosystème et la filière alimentaire : l'« Évaluation des risques pour la santé des abeilles et de la colonie, liés aux cires d'abeilles contaminées et/ou adultérées ». Cette étude met en évidence des menaces significatives pesant sur les populations d'abeilles, soulignant l'importance de la vigilance dans la chaîne d'approvisionnement des produits apicoles.

Pour les professionnels de la restauration et de l'agroalimentaire, bien que la cire d'abeille ne soit pas un ingrédient central, ce rapport résonne avec les principes fondamentaux de la sécurité alimentaire et de la traçabilité des matières premières. Il illustre parfaitement comment des contaminations à la base de la chaîne de production peuvent avoir des répercussions bien au-delà, impactant la qualité et la durabilité de ressources essentielles.

Des menaces multiples : contaminants et adultérants

L'Anses a identifié deux principales catégories de dangers associés aux cires d'abeilles utilisées dans les ruches : la contamination et l'adultération. La contamination est le fait de la présence de substances indésirables qui se retrouvent dans la cire. L'adultération, quant à elle, implique l'ajout intentionnel de substances étrangères.

Les contaminants chimiques en question

  • Résidus de pesticides et acaricides : Largement utilisés en agriculture, ces substances peuvent se retrouver dans le pollen et le nectar récoltés par les abeilles, puis s'accumuler dans la cire.
  • Médicaments vétérinaires : Certains traitements administrés aux colonies pour lutter contre des parasites ou maladies peuvent laisser des résidus dans la cire.
  • Métaux lourds et autres polluants environnementaux : Provenant de l'environnement (sol, air, eau), ils peuvent également s'accumuler dans la cire, agissant comme des réservoirs de toxines.

L'adultération, une pratique frauduleuse

L'adultération des cires d'abeilles implique l'incorporation de substances bon marché pour augmenter le volume ou masquer des défauts. Parmi les adultérants les plus courants figurent la paraffine, la stéarine ou d'autres graisses végétales ou animales. Ces ajouts altèrent non seulement la composition naturelle de la cire, mais peuvent également introduire des composés potentiellement nocifs pour les abeilles, compromettant la structure de la ruche et la santé de la colonie.

Impacts dévastateurs sur la santé des abeilles et la production apicole

Les conséquences de ces cires contaminées ou adultérées sont alarmantes pour la santé des abeilles et la survie des colonies. L'exposition chronique ou aiguë à ces substances affaiblit le système immunitaire des abeilles, les rendant plus vulnérables aux maladies et aux parasites. Elle peut entraîner des troubles métaboliques, des problèmes de développement et une réduction de l'espérance de vie des individus.

Au niveau de la colonie, l'affaiblissement généralisé conduit à une diminution de la population, à une réduction de la production de miel, de pollen et de propolis. À terme, la survie même de la colonie est menacée, contribuant au déclin préoccupant des populations d'abeilles, vitales pour la pollinisation de nombreuses cultures agricoles et, par extension, pour la sécurité alimentaire mondiale.

Au-delà de la ruche : enjeux pour la filière alimentaire

La filière apicole est un maillon essentiel de notre système alimentaire. La qualité des produits apicoles (miel, pollen, gelée royale) est directement liée à la santé des abeilles et à l'intégrité de leur environnement. Des cires contaminées peuvent indirectement affecter la qualité du miel récolté, même si les normes de sécurité alimentaire pour le miel sont strictes.

Pour les professionnels qui intègrent des produits de la ruche dans leurs préparations, ou simplement soucieux de l'origine et de la qualité de leurs ingrédients, ce rapport souligne l'importance d'une vigilance accrue. Exiger une traçabilité irréprochable et s'assurer de la provenance des produits apicoles devient une démarche de bonnes pratiques d'hygiène et de gestion des risques, même si l'impact direct sur l'assiette du consommateur est lointain.

Il est fondamental de comprendre que la santé environnementale est intrinsèquement liée à la sécurité alimentaire. La dégradation de la santé des abeilles par la contamination de leur cire est un signal d'alarme qui nous rappelle la nécessité de contrôler rigoureusement tous les intrants et toutes les matières premières qui entrent dans la chaîne de production, depuis le producteur primaire jusqu'à l'assiette.

Recommandations et perspectives pour une meilleure sécurité

Face à ces constats, l'Anses préconise un renforcement des mesures de surveillance et de contrôle. Il s'agit notamment de développer des méthodes d'analyse plus performantes pour détecter les contaminants et les adultérants dans la cire d'abeille, et de mettre en place une communication efficace à destination des apiculteurs pour les sensibiliser aux risques et aux bonnes pratiques.

La mise en œuvre de ces recommandations est cruciale pour la protection des abeilles et la pérennité de la filière apicole. Elle invite également tous les acteurs de la chaîne alimentaire à une réflexion sur l'importance de la qualité et de la sécurité des matières premières à chaque étape de la production, un principe fondamental de l'approche HACCP.

Source